DOUBLE PRÉSENCE FRANÇAISE SUR LES MISSIONS MARTIENNES EN 2020

Deux instruments français sont à bord du rover européen martien "Rosalind Franklin" : l'imager MicrOmega (CNRS) et le radar Wisdom du LATMOS (Crédit image : ESA AOES Medialab).

Deux instruments français sont à bord du rover européen martien "Rosalind Franklin" : l'imager MicrOmega (CNRS) et le radar Wisdom du LATMOS (Crédit image : ESA AOES Medialab).

Jean-Yves Le Gall, le président du CNES, l’a rappelé cette semaine au cours de ses vœux à la presse, « 2020 sera une année martienne ». Quatre missions doivent décoller dans les prochains mois pour la planète Rouge et deux d’entre elles embarquent une participation scientifique française.

Tous les deux ans, Mars se retrouve en bonne position par rapport à la Terre de sorte qu’il devient possible d’y envoyer une sonde spatiale. Le 26 novembre 2018, c’est le lander américain Insight qui avait rejoint la planète. Entre la seconde quinzaine de juillet et les premiers jours du mois d’août 2020, il y aura donc de la circulation en direction de la quatrième planète du système solaire. Cette année, quatre véhicules spatiaux doivent s’atteler au voyage vers Mars à commencer par la petite sonde émirati d'1,5 t baptisée Mars Hope, "Al Amal" (l'Espoir en arabe) qui doit s'élancer dans l'espace en juillet depuis la base de Tanegashima au Japon. Le second véhicule à destination de Mars cette année est la sonde chinoise Huoxing 1, que nous avions évoqué dans ces mêmes colonnes le mois dernier. Son décollage restait toutefois soumis à la réussite du troisième lancement de la fusée Longue Marche 5. Fort heureusement, la fusée lourde chinoise a accompli avec succès son retour en vol le 27 décembre dernier en plaçant sur orbite géostationnaire (GEO) le satcom militaire Shijian-20. C’est également un lanceur Longue Marche 5 qui doit lancer la mission de retour d’échantillons lunaires Chang’E-5 vers la fin de cette année.

Parmi les objectifs scientifiques de Huoxing-1 : rechercher des traces de vie dans le site d’Utopia Planitia (région où Viking 2 s’est posée le 3 septembre 1976) grâce à un rover de 240 kg descendant des Yutu lunaires et qui doit fonctionner au moins trois mois. L’insertion en orbite martienne de Huoxing-1 est attendue entre le 11 et le 24 février 2021 et l’atterrissage sur Mars pourrait intervenir vers la fin du mois d’avril suivant.

Comme ChemCam sur Curiosity, l'instrument SuperCam sera installé dans le boitier placé au sommet du mat vertical (Crédit image : NASA/JPL).

Comme ChemCam sur Curiosity, l'instrument SuperCam sera installé dans le boitier placé au sommet du mat vertical (Crédit image : NASA/JPL).

Deux instruments français sur Exomars

Cette sonde chinoise sera accompagnée par deux autres rovers : l'européen du programme #Exomars et par l’américain Mars 2020 qui n’est autre que le jumeau de Curiosity, du moins en apparence. Initialement prévu en 2018, le rover Rosalind Franklin d’Exomars doit décoller en juillet prochain à l’aide d’une fusée Proton Briz-M. Conçu par Airbus DS, la masse au lancement du véhicule atteint 2,6 t dont 300 kg pour le rover soit environ 50 % de plus que les MER américains Spirit et Opportunity posés en 2004 à la surface de la planète rouge. Mission « Flagship » du programme Aurora de l’ESA, Rosalind Franklin vise comme site d’atterrissage le bassin d’Oxia Planum. Situé par 17,28° N et 334,29° E, il s’agit d’une formation géologique née il y a 3,9 milliards d’années où l’altitude atteint environ 2000 m. Le rover d’Exomars, qui constitue la troisième partie du programme après la sonde Trace Gas Orbiter (TGO) et l’atterrisseur Schiaparelli en 2016, doit notamment caractériser le sol mais surtout tenter de détecter des indices d’une vie passée, ou présente, dans la roche martienne. Ses panneaux solaires doivent fournir jusqu’à 1200 W de puissance électrique dans ses batteries lithium-ion pour lui permettre de parcourir les sables de Mars pendant au moins sept mois. La charge scientifique comprend neuf instruments scientifiques dont deux sont fournis par la France : le spectroscope imageur MicrOmega, développé par l’Institut d’astrophysique spatiale du #CNRS, qui doit analyser les échantillons collectés par la foreuse du rover. Le second instrument français est le radar Wisdom conçu par le LATMOS et qui doit permettre de détecter la présence de glace dans le sous-sol proche de la surface. Toutefois, les parachutes d'Exomars doivent encore passer deux tests capitaux en février et mars,  qui seront réalisés dans l'Oregon aux Etats-Unis. Leur qualification reste obligatoire pour un lancement l'été prochain.

A l'issue d'une mission de 30 jours, le Mars Helicopter Scout sera abandonné sur le sol martien (Crédit image : NASA/JPL).

A l'issue d'une mission de 30 jours, le Mars Helicopter Scout sera abandonné sur le sol martien (Crédit image : NASA/JPL).

Un hélicoptère sur Mars

Mais la plus ambitieuse des 4 missions programmées cette année est probablement #Mars2020 qui doit parcourir la surface martienne pendant au moins deux ans. Si ce rover emprunte une architecture quasiment identique à celle de son ainé Curiosity, sa charge scientifique sera différente. Déjà parce que Mars 2020 embarque un petit drone hélicoptère : le Mars Helicopter Scout (MHS). Conçu par le Jet Propulsion Laboratory, ce petit engin volant est le premier qui doit évoluer au-dessus du sol martien. D’une masse de 1,8 kg (dont 273 g de batteries lithium-ion), cet aéronef fonctionne à l’aide d’un double rotor contrarotatif d’environ 1 m d’envergure qui doit lui permettre de s’élever jusqu’à une hauteur de 10 m et surtout d’évoluer l’atmosphère extrêmement ténue de Mars au total cinq fois pendant 30 jours. A bord, Mars 2020 sera équipé d’une évolution de l’instrument ChemCam baptisée SuperCam. Capable de générer jusqu’à 4,2 mégabits de données par jour, cet instrument doit, comme son prédécesseur, analyser par tir laser les roches du cratère Jezero, localisé par 18,12 ° N et 77,36 ° E dans la région d’Isidis Planitia. Fruit d’une coopération franco-américaine, et d’une masse de 10,6 kg, #SuperCam est développé par le laboratoire de Los Alamos, qui fournit les trois spectromètres de ce dispositif, et par l’institut de recherche en astrophysique et planétologie (IRAP) pour la partie optique et le laser qui est fourni par Thales Alenia Space. La maitrise d’œuvre du dispositif est confiée au #CNES.

L'autre grande ambition de Mars 2020 (dont le nom définitif n’est pas encore arrêté par la #NASA), c’est de collecter des échantillons de roche destinés à être rapportés sur la Terre dans 43 petits containers qui seront laissés sur le sol. Ceux-ci y demeureront jusqu'à ce qu'une autre mission, encore plus complexe, viennent les récupérer au cours de la seconde moitié de la présente décennie pour les rapporter sur Terre. C’est un défi technologique immense qui pourrait avoir un cout total (Mars 2020 inclus) compris entre 5 et 10 milliards de dollars. La mission qui doit assurer le retour des échantillons pourrait partir vers 2026.

Antoine Meunier

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