Technologie

LE FUTUR VAISSEAU LUNAIRE CHINOIS RÉUSSIT SON VOL INAUGURAL

Prévue pour être réutilisable jusqu'à 10 fois, la nouvelle capsule chinoise dispose d'un système d'airbags pour atténuer l'impact à l'atterrissage (Photo : Xinhuanet)

Prévue pour être réutilisable jusqu’à 10 fois, la nouvelle capsule chinoise dispose d’un système d’airbags pour atténuer l’impact à l’atterrissage (Photo : Xinhuanet)

Après un lancement réussi avec la fusée LM-5B mardi dernier et une mission de presque trois jours en orbite pour la nouvelle capsule habitée a pu être récupérée sans encombre ce vendredi vendredi dans le désert de Gobi. Mais la mise en service de ce nouveau véhicule de transport d’équipages n’est cependant pas pour tout de suite.

Une nouvelle étape débute dans l’histoire des vols habités chinois avec ce premier vol réussi du vaisseau de nouvelle génération (VNG) qui ne transporte pas encore de taïkonautes. Dirigé depuis le centre spatial de Beijing, il était exactement 12h21, heure de Beijing, lorsque le véhicule s’est placé sur son orbite de retour pour entamer sa descente vers le sol. A 13h33, le module de service a été éjecté du module de commande. Celui-ci a ensuite freiné sa descente, suspendu à ses trois parachutes avant de larguer le bouclier thermique. Puis il s’est ensuite posé à 13h49 sur le site d’atterrissage de Dongfeng en Mongolie Intérieure. Durant ses 2 jours et 19h de mission, il aura effectué toute une série d’expériences scientifiques et technologiques. La capsule emportait ainsi des graines afin de vérifier l’impact des rayonnements sur des matériaux organiques. Une imprimante 3D conçue pour fonctionner en microgravité était également installée dans la cabine. Mais l’objectif principal de ce vol expérimental était surtout de simuler une rentrée atmosphérique depuis la Lune en grimpant sur une orbite de 8 000 km d’apogée et inclinée entre 41 et 43 degrés pour laquelle sept manœuvres de propulsion auront été nécessaires. 

Trajectoire suivie par le nouveau vaisseau. La dernière orbite culmine à 8 000 km d'altitude (Image : CCTV/CAST).

Trajectoire suivie par le nouveau vaisseau. La dernière orbite culmine à 8 000 km d’altitude (Image : CCTV/CAST).

Retour à 9 km/s

Par le passé, la Chine a déjà réalisé une rentrée interplanétaire lors du retour sur Terre réussi depuis la Lune de la capsule de la mission expérimentale Chang’E 5-T1 d’octobre 2014 qui visait à tester certaines technologies nécessaires à la mission de retour d’échantillons Chang’E-5 planifiée pour la fin de cette année. La technique utilisée pour la rentrée est d’ailleurs la même que pour la sonde lunaire. Le nouveau vaisseau a donc effectué un ricochet sur l’atmosphère terrestre. Ce procédé doit permettre de limiter les effets de la décélération que subiront par les futurs équipages qui feront le voyage jusqu’à notre satellite à partir de 2030. La technique n’est pas nouvelle puisque les astronautes d’Apollo l’ont également expérimenté. Selon plusieurs sources concordantes, le vaisseau a dépassé les 9 km/s au cours de son retour vers le sol terrestre. Cela reste pour le moment encore en-dessous de la seconde vitesse cosmique qui est de 11 km/s. L’autre charge utile présente sous la coiffe de la fusée lors du lancement n’a pu être récupérée. Du nouveau vaisseau, dont le design évoque les vieilles capsules expérimentales Fanhui Shi Weixing (FSW/satellite récupérable expérimental), il y aura deux versions (14 et 21,6 t).  Avec un nez amovible, son système d’amarrage évoque celui de la capsule Crew Dragon de Space X. Il doit être capable d’embarquer jusqu’à sept personnes ou bien alors trois passagers et 500 kg de fret. Ses dimensions sont de 8,8 m de longueur par 4,5 m de diamètre. Prévu pour être réutilisé jusqu’à dix fois, sa conception a débuté en 2017 et selon les responsables de la CAST, il doit être capable de conduire des missions plus longues que le Shenzhou. La plus longue à ce jour reste la mission Shenzhou 11 qui s’est déroulé durant 33 jours du 16 octobre au 18 novembre 2016.

La "CZ-X" (nom encore inconnu à ce jour), peut-être la fusée qui emportera les premiers taïkonautes vers la Lune (Image : capture d'écran vidéo CCTV).

La “CZ-X” (nom encore inconnu à ce jour), peut-être la fusée qui emportera les premiers taïkonautes vers la Lune (Image : capture d’écran vidéo CCTV).

Mise en service pas avant 2025

Les matériaux utilisés pour le bouclier thermique sont plus légers que les matériaux traditionnels et sont 30 % moins lourds que les matériaux utilisés sur Shenzhou. Le module de commande est équipé de douze propulseurs pour contrôler l’orientation du vaisseau. Aucune date ne parait pour le moment fixée mais sa mise en service actif n’est vraisemblablement pas pour tout de suite. Comme évoqué précédemment, la fusée LM-5B qui a servi à placer  le VNG sur orbite a un planning déjà rempli par douze lancements. Outre les 3 tirs dédiés au module de la future station chinoise (prévus pour durer au moins 10 ans) devant s’étaler sur la période 2021/22, il est également prévu 4 lancements avec le vaisseau Shenzhou (missions 12 à 15). Ravitailler la future station sera nécessaire, quatre missions sont planifiées avec le vaisseau cargo Tianhzou. Outre rallier la future station, la Chine annonce ses ambitions mais n’a pour le moment pas fixé de calendrier pour sa future exploration de notre satellite. La priorité reste l’assemblage de la station spatiale dont l’occupation pourrait démarrer à partir de 2022. Pour les missions vers la Lune, l’utilisation du lanceur super lourd Longue Marche 9 est théoriquement nécessaire. Cependant, un reportage de la télévision nationale chinoise (CCTV) laisse supposer que l’agence spatiale chinoise se dirigera peut-être vers une autre option : celle de la fusée sans nom (la désignation CZ-5 w/ CBC a un temps circulé sur le Net), dont les maquettes ont fait leur apparition l’an dernier, et qui comme le nouveau vaisseau n’a pas non plus de nom. Haute de 87 m et capable de lancer 80 t vers l’orbite basse et 25 t vers la Lune, c’est-à-dire des performances moitié moins importantes que celle de la LM-9, ses 3 blocs principaux sont chacun pourvus de sept moteurs YF-100K (dérivés du moteur YF-100 des LM-5 et LM-7). La poussée totale fournie au décollage serait de l’ordre 2700 t. L’usage de 2 exemplaires de cette fusée (un pour le vaisseau de nouvelle génération et un pour le véhicule de surface lunaire) permettrait de se passer de la LM-9. Si la priorité reste d’abord la nouvelle station, qui sera la première destination du nouveau vaisseau, la Chine continue d’affiner sa stratégie lunaire.

Antoine Meunier

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *