La Chine détaille sa feuille de route en matière d’exploration
En cette première journée d’IAC milanais, l’agence spatiale chinoise (CNSA) a présenté les prochaines grandes étapes de son programme d’exploration lunaire et planétaire et celui-ci s’annonce plutôt chargé au cours des prochaines années.
Lors du dernier IAC européen à Paris il y maintenant deux ans, la Chine avait assuré une microscopique présence avec un simple corner de la China Great Wall Industry Corporation (CGWIC). Largement de retour à Baku l’an dernier, l’Empire du Milieu revient donc en force sur le Vieux Continent puisque la délégation chinoise occupe tout un espace dédié avec notamment plusieurs grandes maquettes de la sonde Chang’E-6 qui a permis le tout premier retour d’échantillons en provenance de la Face cachée de la Lune en juin dernier. Un échantillon…
sous verre était d’ailleurs exposé pour le plaisir des visiteurs. Mais surtout, Chang’E-6 constitue seulement la deuxième étape de la phase 4 de l’exploration de la Lune par l’agence spatiale chinoise. Au cours du traditionnel panel avec les agences spatiales, Li Guoping, ingénieur en chef de la CNSA a indiqué que les missions Chang’E-7 et Chang’E-8 doivent se dérouler respectivement à partir de 2027 et 2028. Devant rejoindre le Pôle Sud lunaire, Chang’E-7 aura comme objectif scientifique de détecter les ressources in-situ, dont l’eau, présentes dans le sous-sol. Pour sa part, si elle aura elle aussi une vocation scientifique, Chang’E-8 constitue la première pierre de la station internationale de recherche lunaire (ILRS) lancée en mars 2021 par la patrie de Mao en réplique au programme Artemis occidental. Une illustration déjà connue a été présentée au public. En revanche, aucune information concernant le projet de station orbitale lunaire, équivalent de la future Gateway du programme Artemis, pourtant annoncée il y a maintenant quelques semaines. Quant aux premiers taïkonautes, Monsieur Guoping annonce la date de 2030 pour le premier débarquement humain sur le sol lunaire.
Repousser les frontières
Pour assurer des communications optimales depuis la Lune, la CNSA prévoit de se constituer un réseau de satellites sur la base des satellites Queqiao utilisé pour communiquer avec les sondes Chang’E-4 et Chang’E-6 posées sur la face cachée. Parallèlement, la CNSA n’oublie pas non plus le Système solaire. Après deux premiers retours d’échantillons lunaires, c’est un retour d’échantillons d’un astéroïde qui sera accompli par Tianwen-2 dont le lancement est projeté l’année prochaine. Cette sonde aura pour objectif 2016 HO3. Cet objet est ce que l’on dénomme un quasi-satellite de la Terre, autrement dit un corps céleste qui est momentanément capturé par le champ de gravité de notre planète. Tianwen-2 aura également comme objectif de réaliser un survol de la comète 311P. Mais le sommet en matière de retour d’échantillons sera celui envisagé en 2028 avec Tianwen-3 qui prévoit de rapporter sur la Terre quelques morceaux de roche en provenance de la planète rouge. Si cette mission part en temps et en heure, elle pourrait voler la vedette à la mission de retour d’échantillons martiens actuellement développée conjointement par la NASA et l’agence spatiale européenne (ESA). A l’horizon 2030, la CNSA escompte aller au-delà de la Ceinture des Astéroïdes puisque la mission Tianwen-4 devrait permettre la première incursion chinoise vers les planètes géantes dont Jupiter et ses lunes. A plus long terme, cette mission pourra également se lancer dans l’exploration de la frontière du Système solaire et du proche milieu interstellaire. Aucune date de lancement ne semble pour le moment annoncée, ni même envisagée, mais ce ne sera vraisemblablement pas avant l’horizon 2030. Il est cependant probable que ces futures missions aient recours à la variante chinoise du Starship. Avec une hauteur de 114 m, il sera légèrement plus petit que la fusée de SpaceX. Cependant son diamètre sous coiffe sera supérieur (10,6 m). Là aussi, aucune date de vol n’est pour le moment projetée mais il s’agira probablement de la clé de voute qui servira à la Chine pour envoyer des hommes vers Mars vers 2050.
A Milan, Antoine Meunier