Technologie

Comet Interceptor aux sources des origines

La mission Comet Intercepter doit étudier une comète navigant pour la première fois à proximité du Soleil (Image : TAS).

Si en 2014, Rosetta a permis l’exploit de poser le petit atterrisseur Philae à la surface de la comète Tchouri, l’une des prochaines missions de classe F, envisagée par l’ESA d’ici 2028 dans le cadre du programme Cosmic Vision, prévoit de survoler une comète, ou un objet interstellaire, mais cette fois-ci dans son état d’origine.

Quel est le point commun entre les comètes de Halley et Tchourioumov-Gerasimenko ? Avant d’être observées de plus près par des engins spatiaux, elles sont toutes les deux passées à plusieurs reprises autour de notre étoile. Chaque passage à proximité du Soleil a donc forcément modifié la structure de ces corps célestes qui sont composés d’éléments volatils. L’ambition de Comet Interceptor est de s’intéresser aux comètes, ou objets interstellaires, avant leur premier survol autour du Soleil. Dans l’optique de cette mission, proposée par le laboratoire de science spatiale de Mullard (Royaume-Uni), l’agence spatiale européenne et Thales Alenia Space UK ont officialisé un premier contrat d’étude le 14 décembre. Prévu pour embarquer aux côtés du télescope ARIEL sur une fusée Ariane 62, Comet Interceptor est une mission de classe F (F pour Fast) de moins de 1 000 kg. Il est prévu que ce vaisseau de petite taille transporte également deux mini sondes (B1 et B2) qui seront déployées dans l’espace. La première doit être fournie par l’agence spatiale japonaise (JAXA) et la seconde par l’ESA. Sur le vaisseau principal, trois instruments doivent constituer la charge utile. CoCa (Comet Camera) qui devra prendre des images dans le spectre visible et le proche infrarouge. L’imageur MIRMIS devra également fonctionner dans l’infrarouge. L’analyseur DFP servira pour étudier les particules. Cet instrument doit également être présent sur la sonde B2, (sous responsabilité de l’ESA), de même qu’une suite d’instruments servant notamment à cartographier la cible qui sera sélectionnée. De son côté, la sonde de la JAXA (B1) doit embarquer, entre autres, une caméra grand angle (WAC) et un imageur destiné à étudier les particules d’hydrogène. Il est également prévu que B1 et B2 puissent réaliser des observations d’encore plus près que leur vaisseau-mère. Dans la perspective du survol d’un corps céleste encore vierge, l’héritage de la mission Giotto (1986) s’avère important notamment sur l’environnement poussiéreux que pourra rencontrer Comet Interceptor.

C’est Ariane 62 qui servira de vecteur de lancement à Comet Interceptor en 2028 (Image : ArianeGroup).

Choix de la cible

Budgétée à 150 millions d’euros (hors coûts de lancement) et prévue pour durer jusqu’à 7 ans, Comet Interceptor est planifiée au décollage à partir de 2028 depuis la Guyane. Toutefois, le vaisseau devra faire preuve de patience avant de rejoindre sa cible. Le scénario prévoit que la sonde rejoigne d’abord le point de Lagrange L2 et stationne le temps que lui soit assigné une destination. Ce qui doit prendre au maximum trois ans. Cependant, « la probabilité d’une détection précoce sera bientôt considérablement augmentée par le grand télescope d’étude synoptique (LSST) », explique Nicola Rando, l’un des responsables de la mission au sein de l’ESA. Basé au Chili, ce télescope, aujourd’hui baptisé observatoire Vera C. Rubin, doit permettre d’augmenter la distance à laquelle les cibles potentielles puissent être découvertes. « On s’attend à ce que les comètes puissent être trouvées à des distances de l’ordre de 20 UA* ». Ce qui représente une distance d’environ trois milliards de kilomètres. « Cela donnerait des délais d’alerte qui pourraient être supérieurs à 5 ans », ajoute Nicolas Rando. Par conséquent, la cible qui sera définie pourrait quand même être connue avant le lancement. De plus, outre les nouvelles comètes, il n’est pas exclu que cette mission puisse également choisir comme destination un objet interstellaire d’un autre type traversant notre système solaire, dans l’hypothèse où sa trajectoire autoriserait un rendez-vous. Dans tous les cas, les scientifiques auront défini plusieurs cibles possibles.

Antoine Meunier

*1 UA : 150 millions de km, la distance Terre-Soleil

©                                 La Chronique Spatiale (2021)

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