Une nouvelle mission européenne vers Vénus
Après DaVinci+ et Veritas annoncées le 2 juin par la NASA, l’Agence spatiale européenne (ESA) a, à son tour, officialisé sa nouvelle mission d’exploration à destination de l’Etoile du Berger. EnVision est attendue d’ici 10 ans en orbite vénusienne dans la foulée des 2 missions américaines.
De 2005 à 2014, Venus Express fut la première sonde européenne d’exploration à s’intéresser de près à la Jumelle de la Terre. Choisie dans le cadre du programme Horizon 2000+, elle s’inscrivait dans la continuité de la sonde américaine Magellan de 1989-1994. Actuellement, la japonaise Akatsuki est la seule à étudier Vénus. Entre 1961 et 1985, les soviétiques y ont envoyés 32 engins dont 9 atterrisseurs posés avec succès entre le 15 décembre 1970 (Venera 7) et le 15 juin 1985 (Vega 2). Budgétée à 610 millions d’euros, EnVision a été sélectionnée face au projet Theseus qui s’intéresse au cycle de vie des premières étoiles ainsi qu’aux sursauts gamma. Elle est la 5ème mission de classe M dans le cadre du plan Cosmic Vision de l’ESA (après Solar Orbiter, Euclid, Plato et ARIEL). Son objectif principal sera de comprendre pourquoi l’Etoile du Berger a évolué pour devenir aujourd’hui l’environnement le plus hostile du système solaire. Il s’agira de déterminer si la planète a pu disposer, par le passé, de conditions d’habitabilité similaires à celle de la Terre avant de parvenir à son état actuel. Il est également prévu de voir si Vénus est toujours aussi géologiquement active. Le vaisseau aura également comme tâche d’améliorer la définition des images qui ont été obtenues au cours de la mission Magellan au milieu des années 90. EnVision, c’est aussi une collaboration. Il est en effet planifié de faire travailler conjointement le vaisseau avec les 2 missions DaVinci+ et Veritas projetées légèrement en avance par l’agence spatiale américaine. « Avec la NASA, nous étudions la possibilité de créer un comité scientifique afin de coordonner le futur retour scientifique des 3 missions », souligne ainsi Fabio Favata, chef du bureau scientifique de l’ESA.
Phase de définition
Parmi les 4 instruments de la charge utile, le Jet Propulsion Laboratory (JPL) devra fournir le radar à synthèse d’ouverture VenSar qui présente des caractéristiques proches de celui qui doit être embarqué sur la mission Veritas programmée pour 2029. Cet instrument doit permettre d’obtenir des images de quelques dizaines de mètres de résolution sur des portions de terrain de 1000 x 1000 km alors que le radar embarqué autrefois sur Magellan ne permettait qu’une résolution de l’ordre du km. Le second instrument, fourni par l’Université de Trente en Italie, est le sondeur radar SRS. Il aura pour mission de transmettre des informations sur le sous-sol vénusien (jusqu’à quelques dizaines de mètres de profondeur) notamment dans les cratères d’impact ou encore les régions volcaniques. La suite VenSpec est un ensemble de trois imageurs (VenSpec M, Venspec H et Venspec U) réalisés en collaboration par le DLR (Allemagne), l’Institut royal d’aéronomie spatiale de Belgique et le Latmos (France). Ils doivent fournir des clichés à haute résolution sur la composition des roches (M), des mesures atmosphériques (H) et récolter des données sur les matériaux soufrés (U). La suite RSE devra servir, quant à elle, à obtenir entre autres une cartographie du champ gravitationnel de la planète. L’expérience doit être menée par l’Université de Nantes. Actuellement en phase de définition, la mission suivra ensuite le processus habituel avec le choix d’un maitre d’œuvre industriel de ce vaisseau dont la masse devrait être de 2,5 t. La fenêtre retenue pour le lancement sur Ariane 62 (2 propulseurs d’appoint) sera celle de 2031 avec une possibilité en 2032 ou 2033. L’arrivée est prévue 15 mois plus tard pour se placer sur orbite basse entre 200 et 500 km d’altitude. La durée primaire de la mission d’EnVision sera de 4,5 ans pour tenter d’élucider les mystères de Vénus.
Antoine Meunier
© La Chronique Spatiale (2021)