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ESSAI EN VOL À PARTIR D’AVRIL POUR LE « SHENZHOU 2.0 »

La future capsule interplanétaire chinoise pourra transporter 4 à 6 taïkonautes (Crédit photo : DR).

La future capsule interplanétaire chinoise pourra transporter 4 à 6 taïkonautes (Crédit photo : DR).

La réussite du 3ème tir de la fusée Longue Marche 5, et la mise sur orbite du satellite SJ-20 fin décembre, semblent donner un coup d’accélérateur au programme chinois habité. De récentes informations indiquent en effet que le prochain lancement de LM-5 (en version LM-5B) devrait voir un essai à vide de ce véhicule de seconde génération au cours du printemps.

Parmi les nouveaux véhicules habités en préparation dans le monde, la Chine prépare celui qui devrait vraisemblablement emmener les taïkonautes autour de la Lune à la fin de la présente décennie. Installé au sommet d’une fusée Longue Marche 5B, ce futur vaisseau interplanétaire, évoqué début octobre dans ces mêmes colonnes, devrait donc réaliser son premier vol aux alentours du mois d’avril. Physiquement, il ne ressemble pas du tout au Shenzhou. Si ce dernier prend sa genèse dans le véhicule Soyouz, son successeur évoque plutôt Apollo. Composé de deux modules, ses possibilités sont supérieures à celles de son ainé américain dans la mesure où il serait capable de transporter jusqu’à six personnes, ou trois astronautes et 500 kg de charge utile jusqu’à la future station spatiale (CSS) dont il devra assurer la desserte. Ce nouveau véhicule sera cependant décliné en deux versions : 14 t pour l’orbite basse (LEO) avec six passagers vers le futur complexe orbital chinois et 21,6 t et quatre personnes pour un trajet vers la Lune. Les images disponibles montrent que les deux versions sont équipées d’un système d’amarrage de type APAS (androgyne).

2 versions : l'une de 21,6 t et l'autre de 14 t (Crédit image: DR).

2 versions : l’une de 21,6 t et l’autre de 14 t (Crédit image: DR).

Une résistance accrue du bouclier thermique

Actuellement au centre spatial de Wenchang, où son lanceur LM-5B sera acheminé début février, la nouvelle capsule devra grimper sur une trajectoire très elliptique qui la fera grimper à 8 000 km d’altitude avant une rentrée atmosphérique à haute vitesse. « Le nouveau vaisseau spatial utilise un nouveau matériau qui a une structure plus résistante à la chaleur qui n’est que d’un tiers en densité par rapport à celui du Shenzhou, mais sa résistance à la chaleur est trois à quatre fois supérieure », précise Huang Zhen concepteur en chef adjoint du programme. Au cours de cet essai, il s’agira de tester les procédures de rentrée et d’atterrissage.  Dans le vaisseau, « nous avons également amélioré le contrôle, ce qui signifie que nous améliorons aussi la précision du point d’atterrissage ».  Lors de la dernière mission Shenzhou, la capsule s’était posée à 90 km du point prévu. Après un retour sous parachutes, le « Shenzhou 2 » doit revenir se poser au sol muni d’airbags.  Le test planifié par la CAST ressemble beaucoup effectué par la NASA avec la capsule Orion le 5 décembre 2014 au cours de la mission EFT-1. Le vol inaugural du vaisseau américain avait permis de simuler une rentrée atmosphérique interplanétaire. Un test décisif dans la perspective des vols Artemis qui doivent théoriquement débuter avec une mission circumlunaire en 2022 (Artemis 2). Lancée au sommet d’un lanceur Delta IV Heavy depuis le centre spatial Kennedy (KSC), le premier exemplaire d’Orion avait culminé à 5800 km d’altitude avant de pénétrer l’atmosphère terrestre à 32 000 km/h. Après deux orbites, Orion avait ensuite amerri sans encombre dans l’Océan Pacifique. La Chine semble calquer son programme de vols habités dans l’espace profond de manière presque identique à celui des Etats-Unis. Elle s’en inspire même largement. Ajoutons que sa prochaine capacité d’accès habité à l’espace doit également être réutilisable en étant capable d’absorber plus d’énergie cinétique que le véhicule Shenzhou compte tenu des contraintes liées à un vol interplanétaire. « Etre réutilisable est la meilleure façon pour nous de réduire les coûts », souligne quant à lui Yang Qing, ingénieur en chef du projet. 

Le module Tianhe de la future station se trouve également sur la base de Wenchang (Crédit photo : DR).

Le module Tianhe de la future station se trouve également sur la base de Wenchang (Crédit photo : DR).

Stratégie technico-politique

Le vol habité reste pour l’Empire du Milieu une donnée stratégique qui lui permet d’assurer son rayonnement dans le domaine spatial depuis maintenant vingt ans. Depuis 1999, le programme Shenzhou a déjà permis de réaliser onze missions dont six avec équipages. La dernière en date est celle du 17 octobre au 17 novembre 2016 qui a permis de réaliser un vol d’un mois au cours de la mission Shenzhou 11 à bord de la station Tiangong 2. Mais avant d’envoyer des hommes vers la Lune, l’étape suivante reste d’abord la nouvelle station spatiale attendu pour 2022. D’une masse de plus de 60 t, ce futur complexe équivaut plus ou moins à la défunte station Mir. De récentes images de la chaine de télévision chinoise CCTV, révèlent d’ailleurs que le module central Tianhe se trouve également sur la base de Wenchang. Mais l’arrivée des taïkonautes autour de la Lune, et à fortiori à la surface, n’est pas encore pour tout de suite. Il faut attendre l’arrivée d’un lanceur d’une classe supérieure à Longue Marche 5 : ce sera Longue Marche 9 qui est attendu pour la fin de la décennie.

Antoine Meunier

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