Corporate

ARIANESPACE EST ENTRÉE DANS SA 5ÈME DÉCENNIE D’EXISTENCE

Le premier tir d'Ariane 1 opéré par Arianespace est le lancement de la mission V9 en mai 1984. Sur le cliché, le lanceur du vol L01 du 24 décembre 1979 (Crédit photo : CNES)

Le premier tir d’Ariane 1 opéré par Arianespace est le lancement de la mission V9 en mai 1984. Sur le cliché, le lanceur du vol L01 du 24 décembre 1979 (Crédit photo : CNES)

Si l’aventure de la famille des lanceurs Ariane débute le 24 décembre 1979 avec le tir inaugural d’Ariane 1, ce n’est que trois mois plus tard, le 26 mars 1980, que nait l’entité qui va permettre la commercialisation des différentes versions de la fusée européenne. Petit rappel historique sur une aventure commencée vers le milieu des années 70. 

Disposer d’un lanceur spatial, c’est disposer d’une capacité stratégique qui permet de s’assurer son autonomie d’accès à l’espace notamment en termes de télécommunications, d’où l’importance de posséder des lanceurs lourds. Si Ariane obéit d’abord à un besoin institutionnel pour se libérer de la tutelle américaine dans les années 70, les responsables des autorités spatiales européennes de l’époque comprennent rapidement que pour assurer la pérennité de la filière, il faut également lui assurer une activité commerciale afin de garantir sa rentabilité. Dans les années 70, on estime que le marché institutionnel en Europe ne représente que deux lancements par an. Début 2020, Arianespace avait prévu jusqu’à vingt tirs (institutionnels et commerciaux) de ses lanceurs opérés depuis Kourou et les cosmodromes de Baïkonour et Vostochny. Malheureusement, le confinement provoqué par l’épidémie de Covid-19 a entrainé un arrêt momentané des activités sur la Guyane. Mais revenons aux années 70…

Entre 2020 et 2023, Arianespace doit exploiter 5 lanceurs jusqu'au retrait du service d'Ariane 5 (Image : ESA-D.Ducros).

Entre 2020 et 2023, Arianespace doit exploiter 5 lanceurs jusqu’au retrait du service d’Ariane 5 (Image : ESA-D.Ducros).

Le leader du marché

Pour que démarre l’activité commerciale d’Ariane, Frédéric d’Allest, alors directeur des lanceurs du CNES, suggère la création d’une société initialement dénommée Transpace. L’idée est approuvée par le gouvernement français au cours de l’été 1978. Pour exister, Ariane doit disposer de charges utiles à lancer. Frédéric d’Allest commence donc à démarcher les opérateurs de satellites. Le 8 décembre 1978, l’américain Intelsat annonce officiellement choisir Ariane (on ne parle pas encore d’Arianespace), pour lancer des exemplaires de la famille Intelsat-V (GEO) en 1983 et 1984. La première commande ferme est signée le 15 février 1979 alors qu’Ariane 1 ne s’est pas encore élevée dans le ciel de la Guyane. Ce n’est que le 26 mars 1980 qu’Arianespace voit officiellement le jour et mai 1984 pour le premier lancement estampillé aux couleurs d’Arianespace (V-9). Il permet de lancer le satellite de télécommunications Spacenet F-1. Les tirs réalisés entre le 24 décembre 1979 et 1984 le sont sous égide du CNES et de l’ESA. Mais la décennie 80 est la période qui va permettre à Arianespace de s’emparer de la première place du marché. Il faut dire que les Etats-Unis ont payé cher leur excès de confiance dans la navette spatiale, la solution qui doit faire baisser les coûts d’accès à l’espace. C’est malheureusement l’inverse qui va se produire. Envoyer dans l’espace les hommes et la charge utile à bord du même véhicule s’avère être un mauvais choix stratégique. Nul ne s’attend en effet à voir exploser Challenger au-dessus de la Floride le 28 janvier 1986. L’avion spatial américain réutilisable ne révolutionnera pas le transport spatial. Les Etats-Unis se trouvant dans l’obligation de redémarrer la production de fusées conventionnelles, Arianespace se retrouve donc en situation de quasi-monopole avec 44 charges utiles à lancer à la fin des années 80. C’est l’arrivée de nouvelles versions du lanceur : après Ariane 1, vinrent Ariane 2, 3 et 4. Ces quatre versions ont été employées à 144 reprises entre 1979 et 2003. La capacité de mise sur orbite est passée de 2,3 à 4,9 t sur orbite GEO à partir de 1988. Dès 1996, les performances sont encore doublées avec Ariane 5 (initialement prévue pour lancer la navette habitée Hermès), avec dix tonnes en orbite géostationnaire et 20 tonnes pour l’orbite basse (LEO). Au total, 108 lancements d’Ariane 5, toutes versions confondues ont été réalisés en un quart de siècle. Au cours de cette période, l’offre s’est diversifiée avec l’arrivée du Soyouz en Guyane en 2011 (également exploité via la filiale Starsem depuis 1996) et de Vega en 2012. Arianespace propose une flotte de lanceurs à ses clients qui doit s’étoffer une fois encore avec Vega C et bien entendu Ariane 6. La concurrence s’est organisée dans le monde forçant le développement en 2014 de cette dernière. Les prix sont tirés vers le bas par de nouveaux opérateurs. Arianespace doit commercialiser les futurs lancements de son nouveau vaisseau amiral de 40 à 50 % moins cher qu’Ariane 5.

Ariane 62 (2 propulseurs d'appoints) sera la 1ère version d'Ariane 6 a être opérée par Arianespace

Ariane 62 (2 propulseurs d’appoints) sera la 1ère version d’Ariane 6 a être opérée par Arianespace

Vers de nouveaux défis

Prévu pour un tir inaugural d’ici la fin de l’année, Ariane 6 comporte déjà 13 lancements sur son manifeste. Le premier est un tir commercial dédié à la constellation OneWeb qui nécessitera l’utilisation de la version « 62 ». L’un des lancements les plus importants est celui qu’Arianespace doit opérer pour le compte de la NASA, en l’occurrence celui du très attendu successeur du télescope spatial Hubbble (HST) : le James Webb Space Telescope (JWST). Initialement programmé en 2018, son envoi vers le point de Lagrange L2 n’aura sans doute pas lieu avant la fin de l’année prochaine. Avec un coût estimé de 10 milliards de dollars, cet instrument scientifique est l’une des charges utiles les plus onéreuses qui doit être lancée dans l’espace. Et c’est un lanceur européen qui s’en chargera.

De plus, outre l’arrivée de nouveaux opérateurs à la politique agressive, c’est aussi l’arrivée d’une nouvelle façon de lancer les fusées : le réutilisable. Aux Etats-Unis, Space X (et bientôt Blue Origin avec le NewGlenn) donne le ton avec son Falcon9. En Chine, ce sera peut-être Longue Marche 8. Dans quelques années, Arianespace opèrera peut-être un futur lanceur réutilisable, descendant du démonstrateurs Themis notamment, en développement au sein d’ArianeGroup. Un premier vol d’essai est attendu vers 2025.

Antoine Meunier 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *