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30 ANS POUR HUBBLE MAIS SON SUCCESSEUR SE PRÉPARE

Hubble photographié pour la dernière fois par des êtres humains, c'était en 2009 lors de la mission STS-125 de la navette spatiale (Photo : NASA).

Hubble photographié pour la dernière fois par des êtres humains, c’était en 2009 lors de la mission STS-125 de la navette spatiale (Photo : NASA).

Cela fait maintenant trois décennies que le « HST » tourne inlassablement au-dessus de nos têtes. Cet instrument dont le concept remonte tout de même à 1923, via Hermann Oberth, nous a permis de révolutionner notre compréhension de l’Univers. En fin de carrière, Hubble doit être remplacé l’an prochain par le James Webb Space Telescope (JWST).

Qui se souvient qu’à sa mise en service, le Hubble Space Telescope était aveugle ? Lancé le 24 avril 1990 par la navette spatiale Discovery lors de la mission STS-31, ce bijou de technologie présentait un défaut bien problématique à sa mise en service le 20 mai 1990. Installé sur orbite basse (LEO) à 540 km d’altitude et incliné à 28,47 degrés, il était équipé d’un miroir primaire trop plat de deux microns. Un problème jugé négligeable au sol mais dont le résultat une fois l’instrument installé sur orbite était sans appel : les premières photos obtenues sont floues. Pour un instrument qui a coûté la bagatelle de cinq milliards de dollars au moment de son lancement, cela fait mauvais genre. Fort heureusement, la NASA corrige le défaut de conception lors d’une première mission de maintenance planifiée, et aussi très médiatisée, en décembre 1993 (SM1 au cours du vol STS-61 d’Endeavour). Particulièrement complexe, elle s’étalera sur 11 jours au cours desquels seront réalisées 5 sorties extravéhiculaires (EVA). Quatre taches prioritaires étaient à réaliser : apporter de nouveaux panneaux solaires fournies par l’ESA, installer la caméra grand champ WF/PC-II et l’instrument Costar, qui remplace le photomètre HSP, (Costar sera lui-même remplacé par le spectrographe COS en 2009). 

Les Piliers de la Création, l'une des photos les plus célèbres prises par Hubble. La zone noire en haut à droite correspond à une région qui n'a pas été observée par le télescope (Photo : NASA)

Les Piliers de la Création, l’une des photos les plus célèbres prises par Hubble. La zone noire en haut à droite correspond à une région qui n’a pas été observée par le télescope (Photo : NASA)

Dernière visite en 2009

Les premières photos nettes de Hubble seront retransmises au début de 1994. Mais le 1er avril 1995, le HST transmet peut-être l’un de ses plus célèbres clichés, Les Piliers de La Création qui nous dévoile les immenses et magnifiques nuages de gaz dans la Nébuleuse de l’Aigle à près de 7000 années-lumière de nous. Parmi ses premiers résultats scientifiques, Hubble nous a aussi permis d’affiner avec précision l’âge de notre Univers. Avant lui, la valeur était comprise entre 10 et 20 milliards d’années-lumière. Avec l’arrivée du télescope spatial, elle a été affinée à environ 13,8 milliards d’années-lumière. Pour qu’il continue de nous dévoiler les mystères de l’Univers, il faut assurer la maintenance. Après SM1 en 1993, il y aura ensuite trois autres missions en 1997 (SM2 au cours de STS-87), 1999 (SM3A lors de STS-103), 2002 (SM3-B sur STS-109) et enfin en 2009 (SM4 durant STS-125). A cinq reprises, cet instrument scientifique de 11 t aura donc reçu la visite des hommes. Il s’agissait d’une opération délicate car il fallait à chaque fois saisir l’instrument avec le bras robot du Shuttle pour l’amarrer dans la soute de la navette. L’objet mesure tout de même 13,2 m pour 2,4 m de diamètre. La dernière inspection humaine reçue par Hubble remonte maintenant à plus d’une décennie et depuis l’arrêt des navettes, il n’est plus envisageable de venir le réparer. Mais il continue de fournir des données scientifiques. Récemment, il aurait observé les conséquences de la collision de deux corps glacés autour de l’étoile Fomalhaut qui est située à 25 années-lumière de notre système solaire. 

Prévu pour durer quinze ans, Hubble a aujourd’hui largement dépassé sa garantie et doit fonctionner au moins jusqu’à l’année prochaine, le temps que la relève arrive à pied d’œuvre avec un successeur qui s’appelle JWST.

Le miroir primaire du JWST est composé de 18 segments en béryllium recouvert d'une mince couche d'or qui, grâce au "Sunshield", demeureront dans une température de -220 °C (Image : NASA).

Le miroir primaire du JWST est composé de 18 segments en béryllium recouvert d’une mince couche d’or qui, grâce au “Sunshield”, demeureront dans une température de -220 °C (Image : NASA).

Des capacités accrues par rapport à Hubble

Baptisé en mémoire de l’emblématique administrateur de la NASA, le James Webb Space Telescope n’est pas prévu, contrairement à son prédécesseur pour de l’observation de l’ultraviolet en lumière visible. Son domaine d’expertise se situe de l’orange du spectre visible à l’infrarouge moyen. Grâce à son bouclier thermique, l’instrument doit baigner dans une température de l’ordre de -220°C.  Ses capacités d’observation dans l’infrarouge doivent être supérieures à celles de son illustre grand frère. Le 31 mars dernier, une étape importante a été franchie. Un test de déploiement du miroir primaire a parfaitement réussi dans les locaux de Northrop Grumman. Parmi ses objectifs scientifiques, il aura notamment pour mission d’observer les premières étoiles et galaxies détectées après le Big Bang. Il est également prévu qu’il puisse étudier la composition de l’atmosphère d’une exoplanète. Construit par Northrop Grumman, JWST est une collaboration entre la NASA, l’ESA et l’agence spatiale canadienne. C’est aussi l’un des engins spatiaux les plus chers jamais conçus. Depuis le lancement du programme en 1997, les coûts ont explosés. En 2018, l’investissement total s’élève à 9,66 milliards de dollars. Plus léger que Hubble, il accuse 6,5 t au lancement, son miroir primaire mesure 6,5 m contre 2,4 m à celui de son prédécesseur. Sa forme est également très différente de celle de Hubble qui ressemblait à un gros cylindre métallique. La partie inférieure de JWST est un bouclier thermique en forme de mille-feuille qui se déplie une fois l’instrument arrivé à sa position de travail. Celle-ci est lointaine : à 1,5 million de km de la Terre au point de Lagrange L2 du côté opposé au Soleil. A l’inverse de Hubble, il ne sera donc pas possible de venir y effectuer des travaux réparations. Depuis le lancement du programme il y a 23 ans, la date de lancement du JWST a glissé de plus d’une décennie. La première date envisagée était programmée à partir de 2007 ! Le lancement – qui doit être l’un des derniers avec une fusée Ariane 5 ECA – reste à ce jour programmé pour le 31 mars 2021 depuis le Centre spatial guyanais (CSG).

Antoine Meunier

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